« Sportifications » – une résidence « ARTISTES & SPORTIFS ASSOCIÉS » de Nicolas Richard portée par l’association Bibliothèques en Seine-Saint-Denis

« Arriver depuis la banlieue, et ne pas traverser Paris, mais en faire le tour, lui tourner autour d’une façon singulière, en parcourant les enceintes sportives du département.

 À l’ovale du périphérique parisien répond comme un écho l’ovale des pistes d’athlétisme, petites planètes maintenues en orbite d’un centre d’attraction.

Se muer en jogger et courir de piste en piste, de stade en stade, de centre sportif en centre sportif pour explorer les figures qui les peuplent, les destins qui s’y croisent, les humains qui les traversent, et constituer un portrait de ces lieux de circulation sous la forme d’une enquête documentaire et poétique.

« Sportifications » – c’est quoi ?

Qu’est-ce qu’un stade ? D’où le regarder ? Qu’est-ce qui s’y passe ? Pourquoi y court-on ? Quel sport y pratique-t-on ? Et si l’on n’y fait pas du sport, qu’y fait-on ? De quoi y parle-t-on ? Comment écrire une voix qui court ?  Comment parle un corps en mouvement ?

Ce projet trouve ses origines dans l’une de mes préoccupations : la place et le rôle du corps dans la pratique de la poésie sonore (vitesse d’élocution, tonalité, volume, transformation de la voix par le souffle, etc.). Comment écrire une voix qui court ?  Comment parle un corps en mouvement ?

Il s’agira, dans la lignée de mes travaux de poésie sonore, d’accélérer la phrase pour la faire déraper, la faire parfois partir dans le décor – et le corps –, entraîner la syntaxe dans un mouvement centripète, et la passer au tamis des sensations physiques à l’intérieur de boucles textuelles travaillées par la question du souffle du coureur. Ces boucles langagières existeront comme les métaphores du stade et de la piste où l’on s’élance pour courir en rond, où ligne de départ et d’arrivée se confondent.

Il s’agira de se rendre, de manière un peu systématique, dans ces stades, d’y recueillir des paroles, des sensations, et d’y courir, d’expérimenter physiquement ces lieux à chaque fois afin que pratique de la course et travail d’écriture puissent entrer en résonnance et se nourrir mutuellement.

À cette exploration sportive et langagière se mêlera la création d’une histoire fictionnelle singulière inventée dans les matériaux documentaires, tissée dans les éléments récoltés (sous forme de notes, d’enregistrements, etc.). En effet, par-delà l’aspect presque encyclopédique et systématique de ce projet tel que je l’imagine aujourd’hui (une course dans chaque stade, un texte pour chaque stade), je souhaite y injecter une part de fiction, et laisser place à l’humain, aux vies qui peuplent ces stades. Entre « la tentative d’épuisement d’un stade de banlieue », pour paraphraser le titre d’un ouvrage célèbre de George Pérec, et l’« autoportrait du poète en jogger », pour reprendre celui d’Haruki Murakami, ce projet dans son processus d’écriture sera attentif à l’émergence d’une fiction documentée, peuplée et inspirée par ces personnages rencontrés dans ces mini théâtres urbains que sont les stades.

Les matériaux récoltés au cours du travail (lectures d’ouvrages de géographie urbaine, d’histoire des équipements sportifs en Seine-Saint-Denis, d’architecture, alliées à l’enquête in situ) ajoutés à ceux de mon expérience personnelle de coureur amateur, seront à la source d’un texte qui tissera des liens entre exploration fictionnelle et documentaire de ces lieux, jouera entre les motifs de la course à pied et l’expérimentation formelle fondée sur la voix d’un corps en mouvement. C’est au croisement de toutes de ces dimensions que le texte s’accomplira, à la recherche d’une expérience physique propice au déploiement d’un souffle poétique en quête d’une épopée urbaine contemporaine. Ce travail dressera ainsi en creux, sous forme parfois comique, un autoportrait du poète en short et en running, l’archétype du flâneur baudelairien y sera en quelque sorte revisité sous la forme du jogger urbain. » Nicolas Richard

Dans le cadre de cette résidence de création, des ateliers d’écriture seront proposés gratuitement aux usagers des bibliothèques, médiathèques et clubs sportifs qui le souhaitent. Contacter les permanents de l’association Bibliothèques en en Seine-Saint-Denis pour toute demandes de renseignements !  

L’objectif des séances de ces ateliers écriture est d’amener les participant·e·s à écrire des courts textes sur la thématique du sport à partir de consignes et d’exercices tirés de textes poétiques, littéraires, d’œuvres sonores, d’images, de documents, etc.

Ces exemples vont nous permettre de repérer et d’utiliser les outils que d’autres auteur·ice·s ont utilisés avant nous, pour décrire les personnes et le monde qui nous entourent. Faire émerger des figures, parler de soi et du monde, déployer des paysages extérieurs et intérieurs, décrire ce qui nous environne et nous constitue à travers le prisme de la pratique du sport. Du souvenir d’une sensation physique à la description d’un stade, du commentaire sportif à la figure du héros épique, cette thématique offre de multiples portes d’entrées pour expérimenter et s’approprier l’écriture et la lecture à voix haute.

Il s’agira d’éprouver de manière ludique différents genres et formes littéraires (poésie, poésie sonore, description, autoportrait, monologue intérieur, etc.), avec des principes très simples qui peuvent permettre de déclencher l’écriture des participant·e·s.

  • Les ateliers « one shoot, one shot » :

Ateliers d’une seule séance de 2 à 3 heures, à partir de 12 ans et adaptables en fonction de l’âge moyen du groupe

Atelier 1 : Se faire des courbatures dans la mémoire…

Cours d’EPS, pratiques en club, en solitaire ou en collectif, entrainements, parties improvisées, compétitions amateurs, match amicaux, victoires, défaites, blessures, 3ème mi-temps, euphorie des stades ou des retransmissions en direct : la mémoire de chacun·e de nous est peuplée d’instants sportifs qu’il s’agira, dans cet atelier, de retraverser et d’explorer grâce au « Je me souviens » de Georges Pérec…

Atelier 2 : « On est les champion·ne·s » (depuis X générations) !

Imaginons que le sport soit aussi une histoire de famille, une course de relais de génération en génération, où, entre les passes et les passements de jambe de nos aïeux, c’est à notre tour d’avoir la balle et d’être sur le terrain…

Cet atelier invitera donc à s’inventer des ancêtres sportifs, et à dresser la liste de leurs exploits : une façon plus ou moins fair-play de raconter son histoire familiale, et de transformer son arbre généalogique en mur d’escalade !

Atelier 3 : Champion·ne·s au quotidien : champion·ne·s du quotidien ?

Que peuvent bien faire les champion·ne·s lorsqu’ils et elles ne « championnent » pas ? Est-ce qu’ils et elles prennent leur petit-déjeuner en grand écart latéral ? Se déplacent en salto arrière ? Regardent l’heure sur un chronomètre ? Dorment en jogging ? Cet atelier sera l’occasion d’éclaircir le mystère, et d’écrire le portrait d’un·e champion·ne dans sa vie quotidienne !

Atelier 4 : J’ai rencontré mon ou ma sportif·ve préféré·e !

Une rencontre, c’est toujours un moment part, un temps donné, un lieu précis, un contexte particulier. « C’était ici… et à ce moment-là, je faisais ceci et il s’est passé ça : j’ai rencontré mon sportif ou ma sportive préférée ! » – on vous laisse réécrire le début, et imaginer la suite…

Atelier 5 : Sportif·ve·s en photo : un mouvement suspendu que l’écriture continue !

Photographier le sport, c’est concentrer dans l’instant un peu de ce qui s’est passé avant, et contenir en germe tout ce qui pourrait se passer après : saisir le geste, bien sûr, mais également les sensations, les émotions… dans cet ateliers images et texte, vous vous appuierez sur des photographies de sportifs ou de sportives pour raconter toutes les histoires possibles que recèlent ces corps en action !

Atelier 6 : Des tours de stade autours des stades…

Transformer de l’ovale d’un stade de périphérie en centre du monde et imaginer que tout tourne autour : c’est l’expérience poétique que propose cet atelier, inspiré par la structure concentrique et géographique du poème sonore Vaduz de Bernard Heidsieck pour décrire un stade par ses alentours…

Atelier 7 : Pour que la vie ne soit plus un sport qui se passe de commentaire…

Si l’on s’amusait avec la forme du commentaire sportif, télévisé ou radiophonique, pour décrire nos actions quotidiennes : ce serait très drôle, et c’est le buuuuuut !

  • Les ateliers « footing & écriture d’endurance »

Ateliers de deux à trois séances de deux à trois heures chacune, à partir de 14 ans et adaptables en fonction de l’âge moyen du groupe

Atelier 1 : Franchir un stade…

Certaines séances de ces ateliers d’écriture, à partir du moment où celui-ci n’est pas programmé en one shot, peuvent également se dérouler en extérieur : dans un stade ou sur le terrain, afin de récolter des matériaux pour écrire.

Comment et d’où regarder un équipement sportif ? Qu’y entend-on ? Qu’y voit-on ?

Des outils d’écriture vous aideront à créer une réserve de mots, de phrases, lors de ces sorties « captations » avec carnets et crayons. Il pourra s’agir par exemple de recueillir des sons, des paroles, des inscriptions (nom du stade, panneaux, affiches, etc.), des lumières, de décrire celles et ceux qui y pratiquent un sport, etc. Un atelier d’écriture qui vous rendra sensibles, en somme, à l’infinité de détails dont regorgent les lieux qui nous environnent…

Atelier 2 : Écrire dans la foulée…

En partenariat avec des clubs sportifs, ces ateliers pourront également être l’occasion d’expérimenter un entrainement à la course ou à une autre pratique sportive accompagné par un entraîneur, et tenter de croiser les disciplines !

Qu’est-ce qu’il se passe quand je cours ? Quel est le vocabulaire pour décrire une course ? À quoi je pense quand je cours ? Comment traduire avec les outils de l’écriture les sensations physiques d’un corps qui court ?

À partir de tous ces matériaux recueillis lors de ces sorties en plein air, vous produirez des récits, des dialogues, des textes poétiques écrits à la sueur de votre front !

  •  « Mise en jambe & mise en voix » : des prolongations pour chacun des ateliers !

Tous les ateliers ci-dessus peuvent faire l’objet d’une séquence de lecture à voix haute, en séance séparée ou dans la même séance.

Une partie des ateliers pourra être consacrée ensuite à la mise en voix et à la recherche sonore autour de la matière textuelle. Il s’agira, pour chacun·e des participant·e·s, de trouver sa propre voix, dans tous les sens du terme. L’objectif sera de faire émerger des intentions de diction, de jeu (articulation, rythme, vitesse de lecture, timbre, volume, hauteur de voix, etc.).

L’objectif de cet atelier sera de vous donner des outils simples qui permettront à chacun·e de trouver une manière de lire son propre texte. L’utilisation d’un micro, de musiques, travailler à lire à plusieurs, et la possibilité d’enregistrer ces lectures montreront comment le son d’une voix amplifiée ou la musique peuvent faire bouger sa propre écriture, et comment les effets sonores d’un texte lu peuvent y être imprimés.

Les participant·e·s seront mis en situation de créateurs du début à la fin du processus puisqu’ils auront à la fois l’occasion d’écrire des textes, et, selon les possibilités, de s’immerger dans les dimensions historiques et géographiques d’un stade et d’y pratiquer un sport, et de travailler la lecture orale qui pourra donner lieu à des enregistrements audio ou à des restitutions.